La demoiselle d’Escalot apparaît brièvement dans le roman médiéval La Mort le roi Artu : incarnation typique du personnage secondaire, elle n’intervient que pour réconcilier le couple d’amants central, Lancelot et la reine. Ces deux-là se disputent, elle est jalouse, lui dément ; à point nommé arrive dans une barque le corps de la demoiselle d’Escalot avec un testament qui rassure tout le monde, où elle indique que certes, elle est morte d’amour pour Lancelot mais que lui ne l’a jamais regardée. Le roman se poursuit aussitôt, cette péripétie rapidement expédiée. Au XIXème siècle, le poète anglais Alfred Tennyson, dans ses réécritures de la légende arthurienne, a mélangé plusieurs personnages nommés Elaine pour faire de la demoiselle d’Escalot une jeune fille condamnée à ne jamais regarder le monde qu’à travers un miroir, qui finit par transgresser l’interdit par amour et en mourir. Deus ex machina de la réconciliation dans La mort le roi Artu, personnage à qui la participation au monde est interdit dans Tennyson, la demoiselle d’Escalot nous a donné envie de nous intéresser à son cas, et plus largement à celui du personnage secondaire. Qu’est-ce que la disparition au théâtre ? Qu’est-ce qu’un personnage à qui le centre est interdit ? Qu’est-ce que la dépersonnalisation dans la relation amoureuse? Une plasticienne-performeuse, une comédienne et un musicien, chacun avec leurs outils et leurs sensibilités, abordent cette question dans un univers visuel et onirique.